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dimanche 25 mars 2018

Transition énergétique : le grand débat éclairé par l’Australie du Sud et la Californie


Grand débat sur la transition : les conditions élémentaires ne sont pas remplies : farce ou manipulation

Un grand débat est censé se dérouler en ce moment sur la Politique Energétique et la fameuse transition. Je crains fort que ce ne soit une farce ou une manipulation profondément malhonnête de l’opinion publique, ou les deux à la fois. Comment les Français pourraient-ils y participer utilement sans prendre le temps, au préalable, d’une information préalable solide et scientifique ? Comment pourraient-ils le faire  sans d’abord un débat solide, organisé, honnête donnant le temps nécessaire à la confrontation et lorsqu’elle est possible à la conciliation, entre experts, expliquant leurs données, d’où elles viennent et ce qu’ils en tirent. Alors seulement, le débat public pourra être honnête et utile.
Il me semble que ce type de débat devrait répondre au principe posé par Auguste Comte : «  Le public ne sait pas ce qu’il lui faut, mais il sait parfaitement ce qu’il veut, et personne ne doit s'aviser de vouloir pour lui. ».  Le public, pour Comte, c’est le peuple informé. Alors accomplissons mon devoir d’intellectuel organique et tentons d’informer, pour commencer sur deux sujets importants. Premièrement, sur la situation en Australie du Sud et les conséquences inéluctables et incontrôlables, même dans un pays bien favorisé par l’ensoleillement, d’un taux supérieur à trente pour cent d’énergies renouvelables non pilotables, voulue par démagogie politique.  Deuxièmement, sur la tentative désastreuse de privatisation de la production électrique en Californie, très riche d’enseignement sur ce qui se passerait en cas de privatisation de la production et de la distribution

Une élection en Australie du sud

Mars 2018 : Le gouvernement travailliste d’Australie du Sud vient de perdre sèchement les élections, des élections que  le Premier Ministre travailliste Weatherill  avait présenté comme  un référendum sur sa politique de l’énergie »

De fait l’Australie du Sud constitue un laboratoire énergétique remarquable.  Le Gouvernement travailliste a mené une politique de développement volontaristes du solaire et éolien, qui produisent environ la moitié de l’électricité, la proportion des trois quart  étant visée. Résultat :

1) Les factures d’électricité bondirent et  l’Etat avait  l’électricité la plus chère du monde développé. Et cela a eu des conséquences sociales – une précarité énergétique comme on n’a pas idée en France.  Les demandes d’aides de nourriture explosèrent et le Banque alimentaire locale fit savoir que les pauvres se privaient de repas pour payer leur électricité. Signalons d’ailleurs que  les trois Etats en tête pour l’importance du solaire/éolien », Australie du Sud, Allemagne et Danemark ont des tarifs proches, les plus élevés du monde industriel, doubles des prix français

2) Une instabilité chronique et grave du réseau.  Durant l’été austral 2016-2017, l’Etat d’Australie du Sud connut une demi-douzaine de coupures, dont l’un concerna tout le territoire – un effondrement total du réseau.  Malgré un plan d’urgence coûteux ( un parc de batteries gigantesques amenés en grande publicité par Elon Musk, mais surtout la construction d’un parc de centrales à gaz), les problèmes ont persisté en 2018 avec encore de nombreuses coupures électriques.   Lors d’un incident en février 2018, quarante salles d’opération d’un hôpital de la capitale se retrouvèrent dans le noir durant vingt minutes. Il n’y eut pas mort d’homme grâce au sang froid du personnel médical, mais l’Association des Médecins d’Australie rappela sèchement au Gouvernement local la nécessité d’une alimentation en électricité fiable.
Bref, les électeurs ont tranché, et les libéraux revenus au pouvoir ont promis de réorienter complètement la politique énergétique.

Une privatisation en Californie : l’ »expérience désastreuse » du gouverneur Davis

La Californie a décidé en 1996 d'entreprendre la dérégulation de son secteur électrique qui était jusque-là, pour l'essentiel, sous le contrôle de l'Etat. La concurrence, disaient les promoteurs de cette politique, allait exercer une pression à la baisse sur les prix, dont bénéficieraient les consommateurs. C'est exactement le contraire qui s’est passé. Les distributeurs d’électricité ont été conduits à une quasi-faillite, ont été étranglés par une dette énorme due à l’explosion des coûts de production totalement libérés alors que leurs prix restaient régulés par l’Etat : ils ont exigé une augmentation de 30% des factures aux consommateurs sans quoi des coupures de courant seraient inévitables.

Que s’est-il passé ? Qu'allait-il advenir  pour les producteurs, autrefois appartenant à l’Etat et maintenant privatisés, dans un marché ouvert, y compris aux producteurs d'autres Etats? Les producteurs de courant, autrement dit les centrales électriques, ont adopté une politique attentiste Dans cette incertitude, ils n’ont strictement rien fait, et, contrairement à leurs engagements, ils n’ont entrepris la construction d'aucune des centrales qu'ils avaient pourtant dans leurs cartons et qu’ils s’étaient engagé à construire. Leur seule vraie crainte, la menace suprême pour eux, c’était la surproduction, et ils n’avaient aucun intérêt à investir et à augmenter une productiondont la rareté assurait leur profit – elle était la garantie pour eux de pouvoir imposer des tarifs élevés et maximiser leurs bénéfices sans investissements.  Mais dans le même temps, dans cette Californie où les industries de pointe bourgeonnent, où chaque ménage multiplie les équipements électriques et électroniques, la demande n'a cessé de croître. Affaires en or pour les centrales, catastrophes pour les particuliers et les industriels avec augmentations de prix et pannes.

De plus, certaines entreprises telles que Enron et Reliant se sont mise à manipuler le marché, par exemple en bloquant la jonction entre le réseau de Californie du Nord et celui du Sud. Cette jonction agissait comme un « goulot d’étranglement » que Enron s’amusait à paralyser en réservant la capacité de transmission sans l’utiliser. Cela faisait encore plus augmenter le prix de l’électricité et permettait à Enron de réaliser d’énormes profits. Évidemment, la Federal Energy Regulatory Commission (FERC) se devait de contrer ces stratégies, mais elle n’avait pas les ressources et la sophistication nécessaires pour le faire.

D’autre part, il y avait souvent des interruptions pour l’entretien de centrales qui se produisaient en même temps, ce qui est normal puisque les producteurs indépendants n’avaient aucun incitatif à coordonner leurs interruptions d’entretien pour ne pas qu’elles se fassent en même temps. Les producteurs avaient plutôt un incitatif à faire leurs interruptions d’entretien en même temps,  puisque cela créait des hausses de prix drastiques et leur permettait d’empocher des profits élevés. Comme les distributeurs avaient de la difficulté à joindre les deux bouts, ils ont eu de la difficulté à payer les producteurs. Certains d’entre eux ont donc arrêté de produire, ce qui a encore contribué à exacerber la pénurie et à faire monter le prix. En Janvier 2001, l’état d’urgence a été décrété par le gouverneur Davis.

Seule Los Angeles s’était sorti du désastre, et heureusement : la métropole de Californie du sud avait refusé de s'engager en 1996 dans le mouvement de privatisation. Son Département de l'eau et de l'énergie a disposé  de plus d'électricité qu'il n'en faut à la ville. Te se permettait même d’ne céder aux voisins.  Plusieurs grandes municipalités (San Francisco, San Diego…) ont alors envisagé de suivre l'exemple de Los Angeles et de créer un service municipal de l'électricité.
L’exaspération gagna les Etats voisins désastre (Oregon, Washington, Idaho), qui avaient l'habitude de recevoir en hiver de l'électricité californienne. La soudaine pénurie obligea certaines grandes usines d'aluminium à diminuer ou à suspendre leur activité.

Finalement, Le gouverneur démocrate Gray Davis résuma la situation en la qualifiant d'«expérience désastreuse». La renationalisation du transport de l’électricité et le régulation des trois plus grandes compagnies productrices fut décidée.

Fin d’une expérience qu’il ferait bon ne pas reproduire

Tous ceux qui le souhaitent peuvent (tenter) de participer au grand débat sur la programmation pluriannuelle de l'énergie (https://www.debatpublic.fr/revision-programmation-pluriannuelle-lenergie)




vendredi 23 mars 2018

Illibéral a-t-il dit ?

M. Macron et un certain nombre d’intellectuels critiquent les régimes « populistes » comme ceux de M. Orban en Hongrie, la cible préférée, mais aussi la Tchéquie, la Pologne, le Danemark, peut-être bientôt l’Autriche et l’Italie ensuite en les qualifiant de démocraties (certes ! ) mais « illibérales » !

De qui se moquent-ils ?

C’est pas illibéral de systématiquement couper court aux débats et aux concertations en commençant d’emblée toute réforme par la menace d’un recours aux ordonnances, des ordonnances que l’on signera fièrement au bureau présidentiel, comme Donald Trump ( un grand libéral !

C’est pas illibéral d’avoir des présidents de groupes politiques ou parlementaires élus à l’unanimité, par acclamations, après que l’instance chargée de les élire ait unanimement accepté de renoncer à un vote secret ? ( Vive les Soviets !)

C’est pas illibéral un groupe parlementaire possédant une majorité écrasante qui ne reflète nullement la composition politique du pays réel, un groupe au surplus de super-godillots obéissant à la baguette gouvernementale, auquel on refuse toute expression libre ? (Mieux que les godillots, Vive les croquenots)

C’est pas illibéral, comme si tout cela ne suffisait pas, de vouloir en plus remettre en cause au parlement le droit d’amendements ?

C’est pas illibéral de discréditer tous les pouvoirs intermédiaires, et par exemple de dénier aux syndicats la représentation d’une partie de l’intérêt général, de dynamiter toutes les institutions paritaires par l’intervention de l’Etat ?

C’est pas illibéral d’intervenir dans le choix libre d’historiens de décider qui et quoi commémorer (et non célébrer !), au point, dans un dernier réflexe d’honneur et de liberté  d’entrainer la démission de dix des douze membre du Comité des Commémoration nationales (Vive l’histoire dont on peut effacer des personnages)

C’est pas illibéral de soutenir un gouvernement (espagnol) qui organise des élections (en Catalogne) où ses adversaires politiques principaux sont soit en prison, soit en exil (Poutine fait-il pire !)

C’est pas illibéral de vouloir faire voter à marche forcée une nouvelle  loi réprimant les fake news alors qu’il existe déjà dans la législation française , depuis  la loi du 29 juillet 1881  un délit de diffusion de fausse nouvelle ou de fausses informations ( mais il est vrai que la jurispridence insiste sur le fait que le ministère publique doit démontrer la mauvaise foi de l’auteur de la fausse nouvelle et que le doute profite au prévenu- c’est ça qui gène ?)

C’est pas illibéral cette loi déposée en catimini et en urgence par des députés En Marche, transcription d’une directive européenne sur le secret des affaires et qui menace de sanctions pénales et financières très dissuasives quiconque divulgue des informations non connue ou pas aisément accessible à des personnes extérieures à l’entreprise ; qui ont une valeur commerciale parce qu’elles sont  secrètes ; qui ont fait l’objet de mesures de protection raisonnables de la part de l’entreprise. C’était bien la peine de glorifier et de voter quelques mesurettes en faveur des lanceurs d’alertes, sans lesquels nombres des scandales financiers (luxleaks, HSBC, Panama leaks) seraient resté ignorés.

 Les journalistes dit-on ne sont pas concernés, mais que feront-il sans sources ? Et puis la tendance a déjà été donnée par cette action de Conforama qui a obtenu de la justice le retrait d’un article du journal Challenge sur ses difficultés financières- une décision qui a même fait sortit de ses gonds le très placide Dominique Seux sur France Inter.

Mais on voit bien ainsi ce qui est important pour ces gens-là. Et si l’on peut se demander pourquoi ces adeptes,  ces serviteurs, de la secte ultralibérale devient ainsi très illibéraux, c’est justement parce qu’ils sont une secte qui ne veut ou ne peut même plus voir à quel point leur idéologie est déconnectée de la réalité.

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mardi 20 mars 2018

SNCF- l’insupportable arrogance de Macron et de son gouvernement ; démission et bêtise de l’idéologie libérale

Insupportables mensonges, manipulations, arrogance !

On le sait, la Commission  Européenne a tous les services publics en ligne de mire et en a juré l’abolition (voir aussi mon précédent blog sur les concessions hydrauliques) ; après, les Etats sont plus ou moins empressés à s’aligner et plus ou moins rusés ou combattifs lorsqu’ils veulent défendre leurs service publics. Avec ce gouvernement- là et cette présidence- là, on a touché le pompon – et ils se fichent vraiment de nous.

Insupportable la façon dont les gouvernants ont laissé se dégrader le service public de la SNCF. Pourquoi donc l’inoxydable, l’indéplaçable, le si précieux M. Pepy a-t-il été maintenu en place, malgré les dégradations continues du service ( Ah Paris Caen, cher à Michel Onfray), malgré les pannes et les journées noires à répétition, malgré surtout les morts (Brétigny 7 morts, 70 blessés) qui auraient valu à tout autre un renvoi immédiat ? Ben c’est qu’il a fait ce qu’il avait à faire, laisser se dégrader le service public du rail jusqu’à ce que le public n’ait plus envie de le défendre. Mission accomplie !

Insupportable la façon dont le gouvernement et M. Macron ont agité la question de la dette de la SNCF…qui est en fait celle de l’Etat. C’est vrai, la dette de la SNCF est faramineuse, 54,5 milliards d’euro soit près de 2% du PIB !!! Mais d’où vient-elle ? Elle vient d’une dette de l’Etat, d’une dette d’équipement qui a été transférée à la SNCF au moment de Maastricht de façon à ce que la France rentre cette année-là dans la zone fatidique des 3%. Et depuis, la pauvre SNCF ploie sous cette dette énorme, dont les frais financiers s’accroissent d’années en années. Et maintenant, le Premier Ministre annonce que l’Etat pourrait la reprendre si les cheminots sont bien gentils…Et avec les intérêts ?

Et tiens, dernière minute, le 22 mars, en pleine grève des cheminots, le le ministre de l'Economie, M. Bruno Le Maire, annonce triomphalement la commande par l'Etat de 100 nouveaux TGV pour soutenir Alstom. Par l'Etat ??? Non, par la SNCF évidemment. Commentaire de ce journal hautement subversif que sont les Echos : " le gouvernement a affirmé à plusieurs reprises la fin du tout TGV, mais il n'a pas pour autant rompu avec cette vielle habitude qui consiste à faire acheter à la SNCF des rames TGV pour soutenir Alstom".  Ains

Insupportable, cette façon de négocier sous contrainte, sous la menace des ordonnances

Insupportable, cette façon de se moquer des gens en affirmant que les petites lignes, structurellement déficitaires mais qui facilitent la vie de nombre d’usagers  ne seront pas menacées ! Elles seront au mieux transférées aux régions, en l’état, sans investissements, et, soit elles seront finalement supprimées, soit les tarifs augmenteront. Ce sera en passant, la fin du service public et de sa péréquation, qui impose que chaque usager paye le même tarif à condition de transport égale. Et ce seront toujours les mêmes qui seront sacrifiés, les territoires ruraux.

Indigne, la démagogie consistant à opposer les salariés aux salariés ( Macron :il ne pouvait y avoir "d'un côté des agriculteurs qui n'ont pas de retraite et de l'autre avoir un statut de cheminot ») ! Ben voyons, on le sait, l’idéal du gouvernement, c’est le contrat de travail, rien que le contrat de travail, plus de conventions collectives plus favorables qui tiennent compte des particularités de telles ou telles branches. Alors, le statut, oui, il peut évoluer et il a déjà évolué : il a ses sujétions (horaires, notamment de nuits, affectations) et ses avantages ( retraites, voyages). Mais, pour autant qu’on le sache, malgré tous ses prétendus mirobolants avantages, il n’y a pas afflux incroyable de candidatures de cheminots ! Le statut est indispensable du service public, il garantit que les agents du service public sont au service du public, et non pas des actionnaires.

Ceci encore : les compétences des cheminots sont rares et nombre d’économistes l’ont prédit ; si le statut saute, les salaires augmenteront. C’est ce qui s’est passé en Grande Bretagne, où c’est même l’une des raisons de l’augmentation importante des tarifs entrainés par la privatisation.

Le contre-exemple anglais ! Au Royaume-Uni, la privatisation des chemins de fer déraille 

Au Royaume-Uni, la privatisation des chemins de fer déraille ! c’est sous ce titre que le très contestataire La Tribune ( 9 janvier 2017) fait un bilan de la libéralisation du trafic ferroviaire en Angleterre.  Cette libéralisation, c‘est tout d’abord une envolée des prix, et pas qu’un peu ;  certains billets coûtent trois à quatre fois plus cher qu’avant la privatisation. Résultat, les Britanniques déboursent chaque mois six fois plus que les Français simplement pour se rendre sur leur lieu de travail :14% de leur revenu mensuel contre 2% pour les usagers de l'Hexagone.

Dans le sud du pays, la situation est particulièrement catastrophique. Entre avril 2015 et mars 2016, quatre trains sur cinq du réseau Southern Rail, qui permet à 300.000 personnes de se rendre à Londres chaque jour depuis Eastbourne, Brighton & Hove ou encore Crawley, étaient en retard. Pire, le très fréquenté Brighton-Londres de 7 heures 29 n'est pas arrivé une seule fois à l'heure en 2014...

S'ajoutent à cela une conflictualité sociale en explosion, des grèves quasi-hebdomadaires de cheminots, (plus de 33 jour de mouvement an en 2017 !) dues à la dégradation de conditions de travail, qui impactent aussi la sécurité, provoquéée par la recherche du profit avant tout..
La "réussite" de la privatisation du rail britannique : près de 60% des Anglais sont favorables à une renationalisation, d’ailleurs demandée par le parti travailliste.

Et c’est cette réforme qu’il est urgent de faire en France et en Europe ! Il y a derrière ceci une idéologie libérale devenue folle,une secte libérale au pouvoir qui, par aveuglement ou pire encore, volontairement, pour servir les intérêts des copains et des coquins, a décidé d’ignorer toute réalité.

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lundi 19 mars 2018

Plan loup: protéger les brebis; flinguer les loups !


Le massacre des innocents/ Près de 12000 brebis tuées en 2017

C’est maintenant chaque année un massacre, et chaque année plus grave. La prédation attribuée aux loups n’a cessé d’augmenter : 8577 victimes indemnisées en 2014, 8964 en 2015, 7880 en 2016, 11700 en 2017 (…) – et il ne s’agit que des victimes identifiées, reconnues. Une ruine aussi pour l’Etat : les sommes versées pour indemniser les animaux domestiques victimes du loup  représentent  3,5 millions d’euros en 2016, et bien plus encore pour les éleveurs de plus en plus nombreux qui en sont victimes. Un argent qui pourrait être mieux employé dans la ruralité !

Quelques témoignages poignants dans Le Figaro du 30 juin 2017 :

« Cette année, j’ai subi une attaque il y a trois semaines, une autre il y a une semaine et celle-ci», poursuit Thierry «Depuis vingt-six ans que suis ici, je n’avais jamais eu de problème et depuis un an, j’en suis à quinze brebis, soit environ 10 % de mon troupeau, ça commence à faire»
« Lorsqu’il s’installe, hors cadre familial, en 2005, à Glandage, Thomas Vernay, alors âgé de 30 ans, est bien décidé à faire ses preuves. Avec sa compagne, ils louent 20 hectares dans cette petite vallée alors en déprise agricole, où «le foncier n’était pas encore trop cher». Ils reprennent un troupeau de 150 chèvres cachemire importées de Nouvelle-Zélande pour «redynamiser la filière». La laine est transformée et la viande vendue en circuit court. Un matin au réveil, vingt-trois bêtes sont tuées et deux sont mangées. L’attaque semble avoir eu lieu vers 5 heures du matin, peu après le départ des gardes de l’ONCFS qui surveillaient le troupeau…. On a encore eu cinq ou six attaques franches avec des bêtes tuées. Pendant qu’on allait récupérer celles qui s’étaient échappées, le loup en profitait pour revenir.» Fin 2011, le troupeau a été amputé de plus de 50 bêtes. Alors tu te demandes : “Qu’est-ce que je suis en train de faire vivre à mes animaux ?” Tu es censé les protéger mais tu n’y arrives pas», explique Thomas, encore marqué par cette expérience. «Il n’y a pas de cohabitation possible avec le loup en l’état», tranche Thomas Vernay.

Celui-ci n’a plus de problème de prédation…

Parlant d’ un de ses voisins : « Celui-ci n’a plus de problème de prédation», lance-t-il. «Il avait 35 brebis, il n’en reste plus une.»

Dès le mois de mai et jusqu’aux premières neiges, Alain met ses 350 brebis en pâture en plusieurs lots autour de sa ferme dans des enclos protégés par des filets et sous l’oeil de ses imposants bergers d’Anatolie. Alain a dû faire face à des attaques dès 2003. «J’étais sur les nerfs, je ne dormais pas. J’ai embauché un aide car l’été, entre le travail de la ferme et les foins, il était impossible de laisser le troupeau libre, il se faisait “cartonner”», raconte l’éleveur. Les brebis sont regroupées la nuit et surveillées par des patous et par Alain, muni d’un phare pour repousser le prédateur. Mais les attaques continuent. «De nuit comme de jour.» «Les premières fois, les agents assermentés venaient faire des relevés et me disaient que c’était mes chiens. J’étais à cran, je ne dormais plus depuis des jours, je ne voyais plus mes gamins et on me mettait plus bas que terre… A ce moment-là, tu vrilles et ça peut partir», s’énerve Alain. Les brebis passent du temps au bord de falaises où elles prennent le vent, à l’abri des buissons de buis. Avec le risque qu’elles «décrochent» si le loup vient à les affoler. Compliqué alors de se faire indemniser car le paiement par l’État est soumis à des traces visibles d’attaque. «Enfin, c’est pas un campagnol qui fait peur aux brebis !», s’agace Alain qui n’a pas eu à connaître cette situation, contrairement, dit-il, à un éleveur du département voisin de l’Isère.

A cela s’ajoute la galère des indemnisations, avec toute la mauvaise foi possible de l’Etat. Si les brebis ont pris peur, se sont jetées dans le vide et qu’il n’ y a pas de traces de morsure, pas d’indemnisation. Pas de tête retrouvée ; pas d’indemnisation. Un cheptel soigneusement sélectionné durant des années, des animaux d’un prix plus élevé… L’indemnisation n’en tient pas compte. Et comble, parfois, les agents de l’Etat mettent en cause non pas les loups, mais les chiens que les éleveurs ont acheté pour protéger leurs troupeaux des loups !

Face aux loups, il n’y a pas de protection possible

Face à tant de massacres et tant de malheurs, les malades de Ferus, les écologistes qui préfèrent les loups aux brebis et aux hommes, vantent la protection par les chiens, le plus souvent les patous. Sauf que le rôle du patou n’est pas simple : élevé au milieu des troupeaux,  il doit être capable de repousser les attaques du loup sans être agressifs avec les chiens qui divaguent ou les randonneurs. Résultat : les éleveurs qui prennent des patous n’osent plus accueillir des touristes à la ferme, surtout avec des enfants. Pour environ 300 loups, il y a déjà 3000 chiens de protection dans les Alpes, c’est considérable et ils sont source de conflits de plus en plus nombreux- », les accidents - attaques, morsures, accidents avec des voitures ou des vélos - sont de plus en plus nombreux, surtout l’été. «Cela pose des problèmes majeurs de partage de l’espace entre les promeneurs, les chasseurs, les touristes, les locaux», énumère Laurent Garde qui constate, dans sa région Paca notamment, que «le monde de la randonnée se retourne contre les éleveurs et certains maires interdisent les chiens de protection… ces chiens que les préfets veulent leur imposer sous peine de ne plus les indemniser ! On frise ici la folie !

A cela, les fous furieux de Ferus répliquent que les promeneurs n’ont qu’a pas se promener ! Ajoutons à cela que les patous sont de plus en plus inefficaces. Les loups sont des animaux sociaux intelligents et s’organisent : «les loups s’approchent, excitent les patous qui, à leur tour, affolent les brebis. Elles cherchent à s’enfuir et cassent les filets. Le loup peut alors saisir ses proies». Le loup a bien compris qu’il était protégé, qu’il pouvait en toute impunité s’attaquer à une nourriture abondante et facile : « «depuis vingt ans, le loup s’est adapté et assimile la proximité de l’homme à la nourriture facile». Le président de l’association des bergers et éleveurs du Vercors explique que dans ce cas, «Il faut prélever la meute entière dans les zones où il est établi que les loups s’attaquent principalement aux animaux domestiques. Ces meutes ne savent plus chasser de la faune sauvage», En effet…

Les éleveurs abandonnés par l’Etat

Ajoutons un phénomène grave : les éleveurs n’ont plus confiance dans les fonctionnaires de l’ONCFS, qui sont accusés (certains l’ont reconnu) d’avoir longtemps minoré la pénétration du loup en France, avec la complicité de Ferus et autres associations écologistes du même esprit- signalons que José Bové , qui connait un peu le problème s’en est démarqué, de continuer à minorer le nombre de loups et d’attaques et à proposer des solution qu’ils savent inopérantes ou inacceptable, et également de nier les croisements entre loups et chiens sauvages- ces animaux n’étant alors pas protégé par la convention européenne. Et lorsqu’écolos et officiels européens opposent la situation italienne, il y a là une grande hypocrisie, car en Italie, il existe des domaines de montagne qui n‘ont jamais été exploités par les éleveurs, et lorsque les loups s’aventurent chez ceux-ci, ils sont intensivement abattus dans des conditions qui passent sous le radar des observatoires officiels….

Alors le plan loup de Nicolas Hulot, dont l’objectif principal reste d’ « assurer la conservation du loup » ( canidé disent les textes officiels, ça rend le loup plus sympa ?), d’en augmenter encore le nombre, reste encore dans l’irénisme des écolos gouvernementaux, tels Barbara Pompili, qui fixait l’objectif de «loups qui vivent en harmonie avec les habitants et les utilisateurs du territoire» !
En janvier, 450 parlementaires, élus locaux, bergers ont signé une tribune libre qui conclut clairement que « la cohabitation est impossible entre loups et troupeaux ». Faisant semblant de les entendre, le Chef de l’Etat déclarait vouloir remettre l’éleveur au centre de la montagne » et réfléchir à la place du loup dans des systèmes qui lui préexistent ». En même temps, protéger les agneaux et les loups ça ne le fait pas ! d’autant qu’il semble en fait que Macron ait une fois de plus cédé à son tempétueux ministre de l’écologie. Il y a là vraiment de quoi comprendre la détresse et la colère des éleveurs.

Un dernier mot ; en tant que positiviste, je pense que l’homme a des devoirs impérieux envers les espèces qu’il a domestiqué, dont celui de les traiter correctement, d’éviter les souffrances inutiles, (et je partage le combat de ceux qui s’indignent contre des conditions inacceptables d’élevage ou d’abattage… et de les protéger. Entre le loup et l’agneau, le choix est clair : flinguer les loups. Face à l’inertie et au déni de l’Etat, face à l’absurde protection de la Communauté européenne déclarant les loups « espèce « strictement protégée », les éleveurs ont le droit d’agir !

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lundi 5 mars 2018

Propriété personnelle des « data » : le dernier combat de la secte libérale- Pour un Commissariat à la souveraineté numérique


Un rapport de Gaspard Koenig

La secte libérale a  ses francs-tireurs, qui ont le mérite d’exposer ouvertement, haut et fort leurs convictions, sans les dissimuler derrière une prétendue fatalité, un « il n’y a pas d’autres alternatives », ou un prétendu réalisme refusant toute idéologie, masquant en réalité une idéologie bien réelle et très contestable et/ou des intérêts très particuliers et très rémunérateurs. Aux USA, ils ont Ron et Rand Paul ; en France, l’un des plus doués est Gaspard Koenig et il lui arrive d’être intéressant et de proposer à la réflexion et au débat public des idées qui ressemblent à ce que sont les expériences de pensée pour les physiciens, comme enfermer un chat dans une boite avec une pastille de cyanure et un dispositif  aléatoire pour en libérer le gaz : utile pour réfléchir, à ne surtout pas mettre en pratique dans la réalité. Son dernier combat vise à promouvoir un droit de propriété privée pour les données personnelles ; Extraits :

« Il s'agit de rendre aux citoyens ce qui leur appartient. Tous les jours nous acceptons des dizaines de cookies sur nos ordinateurs et cliquons « ok » sur des conditions d'utilisation léonines qui nous dépossèdent de nos données personnelles, y compris les plus intimes. Or si la data est bien cet « or noir » du 21ème siècle, il n'y a pas de raison de ne pas payer les producteurs - nous - sans laisser aux raffineurs (les agrégateurs et les plates-formes) l'intégralité des revenus liés à l'exploitation des data. On peut par exemple se rendre compte de la valeur monétaire de nos posts sur Facebook grâce au « Data Valuation Tool ». A l'inverse, chacun doit pouvoir arbitrer les données personnelles qu'il ne souhaite pas partager. Quand j'achète une voiture, j'ai envie qu'elle m'appartienne pour de bon, pas qu'elle alimente le constructeur en données sur ma géolocalisation, mon comportement et mes excès de vitesse... Chaque citoyen doit pouvoir choisir entre vendre ses données aux plates-formes vivant du retargeting publicitaire, ou les conserver (quitte alors à payer le prix du service) »

« Après dix ans de chaos dans la data, il est clair qu'une nouvelle forme de régulation est nécessaire. Il y a trois options. Créer une sorte d'agence nationale des données personnelles qui serait chargée de mettre des data encryptées à disposition des entreprises, sous certaines conditions. C'est le communisme. Ou alors, créer des droits pour les citoyens et des obligations pour les plates-formes qui collectent les données : c'est ce qu'ont choisi de faire la Commission européenne et divers régulateurs nationaux comme la Cnil en France. Le risque est alors d'aboutir à une judiciarisation excessive de l'économie digitale et d'étouffer l'innovation. Nous proposons une troisième option, qui peut s'articuler avec la précédente : celle de la patrimonialité des données pour permettre aux entreprises de se les approprier après avoir justement rémunéré les citoyens. La révolution industrielle a rendu nécessaire un droit de propriété intellectuelle sur les brevets. C'était déjà une construction sociale. Il serait logique aujourd'hui d'étendre le droit de la propriété privée aux données personnelles. »

« Aujourd'hui, les politiques ne comprennent rien au sujet. Mais le thème est très populaire tout simplement car cela peut représenter des revenus supplémentaires pour les gens »

La thèse est notamment défendue dans un rapport Mes data sont à moi. Pour une patrimonialité des données personnelles (generationlibre.eu) qui propose des solutions techniques pour y parvenir. Evidemment, un certain nombre de La République en Marche  ont immédiatement embrayé, sans réfléchir, en bons petits disciples de la secte libérale ou en défenseurs d’intérêts bien particuliers indifférents ou opposés à l’intérêt commun

Les data : bien individuel ou bien commun ?

Commençons tout de suite par évacuer la petite friandise démagogique et typiquement libérale : « cela peut représenter des revenus supplémentaires pour les gens ». Si on prend le revenu de Facebook et qu’on le divise par le nombre d’utilisateurs, cela ne représenterait que 10 dollars par an par individu, donc valeur très maximisée des data. En échange de ses data que vous leur fournissez, Facebook, Google et autres  rendent un service gratuit. D’ailleurs, Google, qui est devenu assez transparent sur le sujet, propose une option dont les conditions d’utilisation précisent très clairement que Google ne peut pas utiliser les données que vous stockez :  le prix est de 40 euros par ans.

Pour la très vaste majorité des gens, le nouveau droit révolutionnaire de Gaspard Koenig, et la promesse de revenus supplémentaires se traduiraient en réalité par une perte ! Antonio A. Casilli, maître de conférences en Digital Humanities à Telecom ParisTech et chercheur associé en sociologie au Centre Edgar-Morin estime : « Une contractualisation sur base individuelle de la valeur de la donnée n’entraînerait qu’une généralisation de la condition de sous-prolétaire numérique”.

La triste  (pour les tenants de la secte libérale) réalité est que les fameuses data, « or noir du XXIème siècle » n’ont aucune valeur individuelle, mais  une réelle valeur pour la société. Et l’idée que les données personnelles ne relèvent pas entièrement (ou uniquement) d’une problématique individuelle n’est  pas neuve.

Un vrai pionnier en ce domaine fut Pierre Bellanger (par ailleurs personnage assez sulfureux), fondateur de Skyrock et patron de ce qui fut durant plusieurs années, au début des années 2000, le plus gros réseau social français (Skyblog). En 2014, il expliquait au Conseil d’Etat que les données personnelles ont changé de nature. « La vision des données comme indépendantes et fondamentalement séparées les unes des autres est une abstraction qui n’est plus pertinente. Les données personnelles se déterminent mutuellement et forment un réseau organique ». Précisant que ces informations « sont d’un intérêt général majeur pour la collectivité, notamment, en matière de santé, de transports, de consommation, d’environnement ou encore de compétitivité économique », il estimait que ce réseau de données par son origine multi-personnelle, son impossibilité à le séparer, et son utilité collective est donc un « bien commun, qui appartient à tous mais ne peut appartenir à personne en particulier ».

Antonio A. Casilli développe aujourd’hui cette idée, malheureusement sous une forme à la mode dont je crains qu’elle ait moins de chance d‘atteindre un large public que les discours simples et efficaces de la secte libérale :  « Quoique personnelles, ces données, ces productions digitales, ne sont pas du ressort de la propriété privée, mais le produit d’un commun, d’une collectivité. Par conséquent, la rémunération devrait chercher à redonner aux commons ce qui a été extrait des commons ». Selon lui, le problème est même de nature éthique, la commercialisation des données par les utilisateurs pouvant créer ”un énième ‘marché répugnant’, formule parfois utilisée pour définir les marchés (comme l’achat d’organes, ou les paris en bourse sur les attentats terroristes).

L’idée positiviste : les théoriciens libéraux sont fort enclins à ne tenir aucun compte de la société

Il est assez surprenant que sur ces sujets nul ne songe à reprendre les critiques fondamentales de la doctrine positiviste et les solutions qu’elle propose. Les textes les plus intéressants à ce sujet viennent probablement des disciples anglais de Comte (cf. notamment mon article La religion de l'humanité de Frédéric Harrison. Positivisme contre ploutonomie, Revue du MAUSS 2014/1 n° 43). Frederic Harrison commence par développer une critique de la notion de droit, que Comte qualifie de métaphysique, ce qui n’est guère un compliment :

« Le socialiste se place sur un terrain beaucoup trop étroit lorsqu’il fonde la revendication de l’ouvrier uniquement sur le droit. C’est une base illusoire, indéterminée, décréditée que le droit. Nous connaissons le droit légal, il signifie simplement ce que le corps politique dirigeant qui a dans chaque État le contrôle de la législation, juge à propos de décider. Nous savons ce que sont aujourd’hui les droits légaux, avec le suffrage démocratique, en Angleterre ou en France […]
Le droit a été mis en pièces par nombre de critiques. Il n’en reste qu’un lambeau provenant du siècle passé, de la pauvre école de Rousseau.. L’homme de demi-instruction qui fait appel au droit entend par droit ce qu’il aimerait voir se réaliser […] Lorsque Stradivarius a fait un violon, que Beethoven a composé une sonate et que Joachim l’exécute sur l’instrument, quels sont les droits respectifs de Stradivarius, de Beethoven et de Joachim sur l’argent que le public paie pour entendre le concert ? Qui répondrait à cette ridicule question autrement qu’en disant : les droits du facteur d’instrument, du compositeur et du virtuose seront la part que chacun d’eux conviendra d’accorder aux autres ? Précisément : les droits nous mettent en présence d’un dilemme insoluble, sauf lorsqu’ils sont établis sur le libre contrat. Or le libre contrat est le système même que les ploutonomistes vantent comme le seul système équitable à tout jamais ; et c’est le système au nom duquel aujourd’hui toute cruauté et toute oppression s’imposent en Angleterre, en Écosse, en Irlande. »

Significativement, ce passage introduit un paragraphe intitulé : « Les théoriciens socialistes sont fort enclins  à ne tenir aucun compte de la société ». C’est évidemment encore plus vrai des théoriciens libéraux, dont Margaret Thatcher a ainsi radicalement résumé la doctrine «  there is no such thing as society ». Mais Frederic Harrison, par proximité idéologique, s’adresse aux socialistes, et il n’est pas intéressant de remarquer combine, depuis très longtemps, certain socialistes ont au fond accepté les idées les plus contestables, les plus métaphysiques, idéologiques des fondamentalistes libéraux, et des thèses totalement antagonistes à ce qui fonde même le socialisme.

Revenons à nos data. Elles ne résultent pas d’un travail individuel, elles résultent de l’existence même de la société et des interactions qui s’y développent. Elles sont donc les propriétés de la société ; d’où un premier principe, décalque très proche d’un mot d’ordre positiviste : «Les data, étant d’origine sociale, doivent être sociales dans leur destination ». Ce qui signifie que ce sont les sociétés qui doivent tirer profit de leur utilisation. Ce qui signifie deux choses ; dans nos sociétés organisées démocratiquement dans le cadre national, ces data appartiennent à l’Etat, lequel a premièrement le droit de les vendre, deuxièmement, le devoir de contrôler leur utilisation pour le bien public.

Cela ne signifie pas que c’est l’Etat qui aurait le seul droit de les exploiter. Ce serait là le communisme dénoncé par G. Koenig, et une profonde erreur. Un second principe positiviste formule que « la propriété fonction sociale, doit, dans la plupart des cas recevoir une appropriation personnelle, pour être employée avec indépendance et responsabilité au service de la famille, de la patrie et de l’Humanité » ; que cette appropriation personnelle est à la fois la condition de tout progrès et celle des libertés individuelles.

Un Commissariat à la souveraineté numérique 

Une solution positiviste serait donc que les data générées par la société appartiennent à une agence étatique -Pierre Bellanger proposait un « Commissariat à la souveraineté numérique » dont « la mission première serait la mise en œuvre du système d’exploitation souverain. Un tel organisme est complémentaire des administrations et compétences existantes. Sa structure comme son budget sont particulièrement légers. Il correspond, dans le principe et la volonté, à ce que fut le Commissariat à l’énergie atomique de l’immédiate après-guerre. »
Cette structure assurerait la souveraineté numérique de la France et un service public garantissant que les collectes et stockage de données issus de la société française se font conformément aux lois françaises,  et que leur communication éventuelle et leur utilisation se font dans l’intérêt de la France, dans l’intérêt commun des Français.

Il aurait encore pour mission de définir et organiser ces données de la façon la plus utile possible et de mener une véritable prospective quant aux utilisations possibles pour la santé, l’enseignement, l’énergie, les transports, l’emploi, la consommation, l’environnement ou la compétitivité économique.

 Par contre, il n’aurait pas vocation à exploiter lui-même ces données et à inventer, mettre en place, faire fonctionner les services correspondants : cela sera mieux pris en charge par l’initiative privée, selon des conditions et des licences bien définie. Et l’on peut même rêver que cette structure, sans que cela soit forcément son but premier, constitue un avantage compétitif considérable dans la naissance d’industries françaises de l’exploitation de données. Le Commissariat aurait la responsabilité non de l’exécution, mais de la régulation de ce nouveau secteur économique, dont on sait déjà qu’il prendra une importance considérable.
Une telle structure était prévue par la loi Lemaire sur l’économie numérique, mais n‘a pas été mise en place et sa mise en place ne parait plus d’actualité. Il semble que les députés en Marche s’intéressent peu à ce sujet pourtant primordial, à moins qu’ils ne soient complètement sous-influence de la secte libérale, zombisés et incapables de toute réflexion. Il serait au contraire grand temps de reprendre le sujet.


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