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lundi 27 février 2017

Le futur sera eugéniste _ un défi pour le CCNE

Dans un blog récent, je souhaitais bonne chance au nouveau Président du Comité Consultatif National d’ Ethique, le Pr. Delfraissy, à propos d’un jugement on ne peut plus discutable  remettant en cause la politique de bénévolat du don de sang ombilical décidée par le CCNE. Mais la fin de l’année 2016 a amené deux événements scientifiques importants, l’un assez médiatisé, l’autre plus technique et passé plutôt inaperçu, qui le concernent au plus haut point, car tous deux entrainent l’observateur impartial vers une certitude. : nos sociétés futures seront eugénistes, reste à savoir dans quelle mesure et pourquoi faire ?

Le premier bébé à trois parents.

En avril 2016 est né le premier bébé à trois parents- mais la naissance n‘a été annoncée que le 27 septembre 2016 par l'American Society for Reproductive Medicine. Une équipe médicale internationale menée par le Dr John Zhang, du Centre New Hope Fertility à New York, a utilisé une technique inédite de transfert des matériaux génétiques du noyau pour éviter que la mère ne transmette à son enfant des gènes responsables du syndrome de Leigh ou Encéphalomyopathie nécrosante subaiguë, provoquant une perte rapide des capacités cérébrales et la mort après d’atroces souffrances en quelques année- plus rarement les enfants malades atteignent un âge de sept huit ans. Une des formes les plus graves résulte d’un défaut génétique des mitochondries, cette centrale énergétique de la cellule, et ces mitochondries, en l’occurrence défectueuses, sont uniquement transmises par les mères. L’ADN mitochondrial est différent de l’ADN du noyau des cellules.
Le Dr Zhang a proposé un protocole consistant à prendre un ovule d’une femme pouvant transmettre la maladie de Leigh, en enlever le noyau et les gênes qu’il contient et le transférer dans l’ovule d’une donneuse saine, privée de son noyau mais gardant son ADN mitochondrial sain. L’ovule a été ensuite fécondé par le père et porté par la mère. Ainsi l’enfant à naître at-il hérité du patrimoine génétique de ses deux parents et de l’ADN mitochondrial sain de la donneuse d’ovule. Cinq ovules ont été préparés de cette manière, un seul était sain et a été transféré avec succès. L’opération étant illégale aux USA, elle a été menée au Mexique- heureusement, il n’y avait pas encore de mur !
La presse française et européenne en général a rapporté se succès avec beaucoup de réserves ( Une technique qui pose de graves questions etc.) Alors, ceci : le couple qui a eu recours à cette technique avait déjà eu deux enfants atteints et décédés de la maladie de Leigh et la mère avait subi deux fausses couches !
Bienvenue dans le monde au petit Abrahim Hassan, et espérons pour lui-  les interférences entre ADN mitochondrial et cellulaire ne sont pas bien connue. Mais , si cette technique fonctionne, le Dr Zhang et les parents Hassan seront des héros de l’Humanité comme Pasteur et Joseph Meister. Au nom de quoi la recherche et l’expérimentation sur cette technique devraient-elles interdites ? En France et pas en Angleterre ? Cela ne peut plus longtemps tenir.

Des centaines d’embryons à partir de cellules de peau… chez la souris pour l’instant

L’autre événement scientifique est le fruit du travail du professeur Katsuhiko Hayashi de l'université de Kyushu et de son équipe. (Mouse eggs made from skin cells in a dish (Nature 538, 301 (20 October 2016) Une partie des ovules primitifs ont été créés au départ de cellules souches embryonnaires, tandis que d'autres l'étaient à partir de cellules de peau prélevées sur la queue des souris. Une "soupe" chimique a ensuite été reconstituée, reproduisant l'environnement naturel d'un ovaire pour inciter les cellules souches à se transformer en follicules, soit des petits tubes contenus dans les ovaires, au sein desquels se produisent les ovules. Conformément aux prévisions, des ovules sains ont été récoltés dans ces follicules.
L'équipe japonaise a ensuite fécondé ces ovules avec du sperme de souris, et ainsi obtenu plusieurs centaines d'embryons aux tout premiers stades de leur développement. 300 d'entre eux âgés de deux jours ont ensuite été implantés dans des souris femelles "porteuses".
Au total, l'expérience a abouti à 11 grossesses, toutes ayant abouti à la naissance de souriceaux parfaitement viables, et qui ont abouti à des spécimens en parfaite santé et fertiles. "C'est la première fois que l'on fait état du développement en laboratoire d'ovules entièrement matures et fécondables, en partant directement des premiers stades du développement de l'ovule. Même si nous sommes encore loin de la création d'ovules humains, cette étude nous fournit des modèles expérimentaux destinés à explorer le développement des ovules chez d'autres espèces, parmi lesquelles l'espèce humaine... un jour cette approche pourrait être utile aux femmes ayant perdu leur fertilité à un âge précoce, ainsi que pour améliorer les traitements plus conventionnels de l'infertilité", commente Richard Anderson, professeur de sciences de la reproduction clinique à l'université d'Édimbourg.
Nous savons déjà trier des embryons aux premiers stades pour éviter certaines malformations ou maladies génétiques…ou choisir le sexe de l’enfant. Mais les tentatives ou tentations eugénistes étaient sévèrement limités par le nombre d’embryon-  trier quatre, cinq, six embryons limitent sévèrement les possibilités. Or, avec l’expérience du Dr Hayashi, ce sont plusieurs centaines d’embryons qu’il sera possible d’obtenir ; alors l’eugénisme devient possible.

L’eugénisme devient possible, il se fera

Donc il se fera. Je ne vois aucun exemple de technique inventé par ‘homme qui n’ait été appliquée – et surtout, et à bon droit, si elle permet de remédier à des problèmes dramatiques Mais, en bon positiviste, je crois aussi que progrès, intellectuel, technique et moral vont de pair et que, parce que nous possédons les connaissances intellectuelles et les capacités techniques qui permettent l’eugénisme, nous saurons aussi l’utiliser à bon escient. L’homme a su limiter l’emploi des balles dum dum (interdites lors de la  Première conférence de La Haye en 1899), l’utilisation militaire des armes chimiques, celui des armes nucléaires.
Mais encore faudrait-il que nous prenions conscience de ce qui se passe au lieu de se muer dans un déni inutile et dangereux, et d’en mesurer les avantages, les enjeux les dangers. ¨Il faudra notamment mesurer le danger extrême que représenterait pour l’espèce humaine la tentation d’une ingénierie qui la rendrait extrêmement fragile en recherchant des modèles prétendument parfait La connaissance scientifique nous aide ici, en rappelant que des mutations peu favorables, comme la thalassémie, ont contribué à sauver les populations du paludisme ; ou encore que la mutation du gêne d’une chimiokine (CCR5-Delta 32 Mutation), qui peut diminuer l’immunité, protège contre le virus du sida.

Donc un vrai travail au plus haut point nécessaire d’exposition, de discussion, d’appréciation de la part des scientifiques impliqués, des Comités d’Ethique, des parties prenantes. Seront-ils à la hauteur ? Il faudrait qu’ils ne tardent pas trop à s’y mettre !


mardi 21 février 2017

Perplexités politiques et présidentielles : 2) dangers imminents : l’écrasement des classes moyennes fait naître des monstres politiques.

Taxer l’immobilier- ISF, impôt sur le patrimoine et loyers fictifs

Dans un premier blog consacré à ce sujet je m’inquiétais de la mauvaise qualité des émission politiques, type la Grande Emission, qui ne permettent pas un vrai débat mais l’opposition de vérités alternatives, et qui par mépris, insuffisance ou manque de travail des journalistes ne permettent pas de mettre en évidence les immenses failles d’une Marine Le Pen bien rompue à l’exercice médiatique.
Je souhaiterais ici mentionner un autre sujet d’inquiétude qui est, me semble-t-il que des candidats comme Macron ou Hamon n’ont pas tiré les conséquences d’autres élections inquiétantes, qui est que l’écrasement des classes moyennes produit des monstres politiques.

Ainsi, nous avons entendu Hamon dire qu’il allait financer son revenu universel par une fiscalité sur le patrimoine ; et Macron expliquer que, pour le salut de l’économie française, il fallait supprimer l’ISF sur les actions pour en faire un impôt portant uniquement  sur la « rente immobilière » – ce qui sous-tend son aggravation pour les propriétaires immobiliers. Ce ne devrait d’ailleurs pas être une surprise, car Macron s’était déjà déclaré intéressé par une invention diabolique de Bercy, celle d’un impôt taxant la propriété immobilière sur des revenus fictifs qu’elle pourrait générer ; ainsi, si vous êtres propriétaires habitant, vous serez imposé sur les loyers que vous pourriez toucher de la location de votre habitation, au motif que l’Etat n’a pas à favoriser la propriété par rapport à la location et que c’est un choix de vie individuel. Le genre de monstruosités qu‘on envoie comme ballon d’essai, et qui finit toujours par ressortir.

On comprend bien la logique derrière cela ; pour augmenter les impôts, on ne peut plus taxer la grande fortune et son patrimoine très mobile qui s’enfuit si facilement ; non il faut taxer le patrimoine qui ne peut pas fuir, celui des classes moyennes. Donc, les classes moyennes et leur aspiration à la propriété qui n’est pas, comme même l’avait compris Proudhon le vol, mais une des meilleurs garanties de liberté !

Et, effet,  pour Macron qui rêve de salariés ultra mobiles et précarisés, et pour Hamon qui surjoue l’animosité contre les propriétaires en pensant que ça fait de gauche ( au fait, n’est-il pas propriétaire lui-même ?), la taxation de l‘immobilier apparaît comme une bonne recette.  

Mais c’est aller contre les désirs de beaucoup de Français et c’est surtout oublier cette leçon politique très simple : l’écrasement des classes moyennes produit des monstres politiques. Qu’ils se méfient : les scores de Marine Le Pen au deuxième tour augmentent dangereusement. Macron par exemple serait sans doute un adversaire très à sa portée : le souvenir de la li travail et encore quelques déclarations comme « Il n’y a pas une culture française, il y a une culture en France et elle est diverse. » et il se fera exploser.

Il y a pourtant besoin d’une forte politique d’investissement immobilier

Alors que tant de nos compatriotes sont mal ou pas du tout logés, que le droit au logement est une aimable plaisanterie, il y a un immense besoin d’encourager l’investissement immobilier. Ainsi, la différence entre les dépenses immobilières (emprunt ou location) contraintes des ménages en France et en Allemagne ont été longtemps signalées par les économistes comme un facteur très important et négatif pour l’économie française aux conséquences graves et multiples :  moins de croissance et de marge pour les autres dépenses, pression sur les salaires nominaux, éloignement des salariés de leur lieu de travail, augmentation des prix des loyers pour les entreprises…

Et il a aussi une incidence forte sur le chômage : selon une étude de Pôle Emploi de 2016, les difficultés d'accès au lieu de travail - et donc un trop grand éloignement du logement par rapport au site d'emploi - constituent un problème de recrutement dans 24% des cas ! Et aussi le prix des logements ou des locations celui des transactions immobilières en cas de déménagement.
Le mal logement résulte aussi du fait que les logements sociaux restent occupés par des salariés des classes moyennes qui ne parviennent plus à se loger de manière acceptable dans le parc privé.

Taxer et décourager la construction et l’investissement immobilier, décourager la propriété immobilière constitue non seulement un danger politique extrême, mais aussi une absurdité politique… d’autant que les emplois concernés sont largement locaux…

Donc ni Macron, ni Hamon !
Alors qui , Un Fillon bien affaibli qui sera dans l’incapacité- tant mieux ! – de réaliser son programme ultra libéral ?

Bayrou ?

dimanche 19 février 2017

Perplexités politiques et présidentielles : 1) la nullité dangereuse des émissions politiques


Cette élection qui vient me rend de plus en plus perplexe et, à vrai dire, m’inquiète. Quelques raisons :

Marine Le Pen, l’euro et les journalistes et émissions politiques
                                                                                                   
L’Emission Politique de Marine Le Pen, le 10 février : catastrophique pour le débat politique, très inquiétante quant à ses résultats. Visiblement les journalistes de l’establishment médiatique, les Pujadas Salamé etc. ont décidé que les téléspectateurs sont incapables de s’intéresser à un vrai débat et de le suivre – comme si les primaires de la droite et de la gauche n’avaient pas démontré le contraire. Alors on s’efforce de mettre en scène un machin qui multiplie les distractions, reportages, invités mystères, mise en scènes de clash attendus, un truc haché de machins, à moins que ce ne soit l’inverse et qui ne permet aucun débat approfondis ou même quelques échanges un peu suivis. Et Pujadas qui s’est cru fin en invitant Buisson, réussissant une fois de plus à faire apparaître Marine Le Pen comme modérée et presque pas de droite ! Puis le chlash recherché avec une Najat Vallaud Belkacem tellement et bêtement agressive qu’elle en faisait apparaître Marine Le Pen comme responsable et pondérée ; puis les invités populaires, de la société civile, qui pose la question qui les intéresse et ne peuvent que se faire balader par des politiques tout de même un peu exercés.

Et surtout quel manque terrible et impardonnable de préparation ! Sur cette question centrale et tellement importante de la sorte de l’euro, Pujadas pose la question de la dévaluation lors du passage au nouveau franc, comme un argument massue, celui qui va tuer (médiatiquement s’entends) la candidate ou du moins son programme ! Décidément, à force de prendre les autres pour les imbéciles, il le devient lui-même et Marine Le Pen avait évidemment préparé son contre argument qui tue tout autant «  Oui, mais voyez-vous Monsieur Pujadas, l’euro depuis un an a baissé de près de 30% par rapport au dollar, et personne, dans la vraie vie courante, ne s’en est aperçu ! »

Et dans la bande des prestigieux journalistes, grands dépendeurs d’ andouilles, il ne s’en n’est pas trouvé un pour lui faire remarquer qu’elle venait ainsi de sortir l’un des meilleurs arguments… en faveur de l’euro ! Rien ! Nada ! Pujadas, tel un ara après un coup de chaleur, se contentant de répéter mécaniquement « et la dévaluation.. et la dévaluation »

L’un des meilleurs arguments… en faveur de l’euro pour au moins deux raisons. Car en effet, l’euro a bien perdu depuis un an près de 30% par rapport au dollar et cela n’a pas eu grand effet sur notre vie courante. Mais c’est que l’euro est la monnaie commune d’une zone économiquement intégrée dans laquelle, à la louche, chaque pays effectue 70% de ses échanges avec les autres ! Il en irait tout autrement si par malheur les projets de nouveau franc de Mme Le Pen se concrétisaient – car c’est la quasi-totalité des échanges de la France, avec les autres pays européens qui s’en trouveraient affectés et la quasi-totalité de nos importations qui se renchériraient d’un coup, provoquant inflation, perte de pouvoir d’achat, spoliation des épargnants…,

D’autre part, son argument montre qu’il est possible, pour peu que l’Europe le veuille, de jouer sur le cours de l’euro pour l’ajuster à nos besoins et aux circonstances économiques, en évitant les inconvénients d’une monnaie surévaluée sans que cela ait d’influence néfaste. Il suffirait qu’au lieu d’une dévaluation vis-à-vis du dollar qui s’est faite toute seule, il y ait une politique monétaire de la Banque Centrale pour piloter le cours de l’euro. Je ne vois là rien d’impossible.
Au lieu de cela, Marine Le Pen veut-elle en revenir aux fameuses dévaluations compétitives intra européennes, soit la lutte de toutes les monnaies européennes les unes contre les autres, ces dévaluations qui n’ont jamais amélioré la compétitivité de qui que ce soit ? Ce serait une catastrophe totale qui tirerait nos industries vers les productions de faibles valeurs à bas salaires, soit le contraire de ce qu’il faut faire !

Enfin, comment penser que le nouveau franc permettrait à la France, à la France seule, ô mânes de Maurras, de retrouver une souveraineté monétaire et économique ? Nous avons vu au contraire comment des firmes françaises et européennes ont été purement et simplement rackettées par le gouvernement américain en punition du non-respect d’embargo purement américains, sans légitimité internationale, contre certains pays…parce que ces échanges avaient  eu lieu en dollars ! Avec la politique néo isolationniste que semble prendre l’Amérique, la perte irrévocable de son statut d’hyper puissance,  il existe une vraie opportunité pour qu’un euro intelligemment géré devienne de plus en plus une véritable monnaie internationale qui permettra la fin d’un impérialisme américain brutal  et inacceptable. Il est possible et désirable de mettre fin à l’hégémonie du dollar tout en évitant de la remplacer par l’hégémonie d’une monnaie Asie pacifique que préparent lentement mais surement les Chinois. Le monde a besoin de plusieurs monnaies de référence, l’Europe a besoin de la sienne, et ce ne sera surement pas le nouveau franc de Mme Le Pen.


E il est bien regrettable que les journalistes bien établis méprisent à ce point le peuple français qu’ils s’obstinent à lui dénier le doit à de vrais débats au lieu d’émission informes où l’on peut juste opposer une « vérité alternative » à une autre, bien regrettable aussi que par paresse, par mépris, par désinvolture, ils ne se donnent pas la peine de travailler sur le programme et les arguments  de Marine Le Pen de façon à pouvoir les discuter et les contrer valablement. C’est regrettable et bien inquiétant. De plus en plus !

jeudi 16 février 2017

Du corporatisme judiciaire (2)

La loi Lemaire : les juges secoués par l’arrivée des algorithmes… et tant mieux !

Les Etats-Unis l’ont fait, la France s’apprête timidement à le faire : la mise en ligne de millions de décisions accessible à tous, bref de toute la jurisprudence, accessible à tous, permettra de connaître et de comparer les jugements – et  éventuellement de les prédire. C’est le résultat de la Loi Lemaire sur le numérique d’octobre 2016 dont un article prévoit que « les décisions rendues par les juridictions  judiciaires sont mises à la disposition du public à titre gratuit dans le respect de la vie privée des personnes concernées. C’est un progrès démocratique dont il faudra…rendre justice à ce gouvernement. (NB les données seront anonymisées).
Le Monde du 20 janvier 2017 rendant compte de cette avancée titre : « Les juges secoués par l’arrivée des algorithmes. La mise en ligne de millions de décisions permettra de comparer, voire de prédire les jugements ». Et en effet, le moins qu’on puisse dire est que les juges accueillent ce progrès avec beaucoup de réticences : « La capacité illimitée des algorithmes d’internet D’analyser, classer et profiler les millions de décisions judicaires rendues va mettre encore plus en évidence la fragilité de notre justice si elle n’est pas en mesure d’expliquer pourquoi la Chambre A et la Chambre B d’une même Cour ne disent pas toujours la même chose sur un même sujet de droit ». ( Le Président de la Cour d’appel de Rennes).  «  L’acte de juger devient instable » (Présidente de la Cour d’appel de Paris.
Alors que l’USM (Union Syndicale des Magistrats) tente d’obtenir l’anonymat des juges et critique la loi au motif que ce serait un » magnifique instrument pour identifier les juges qui ne rendent pas les décisions dans le sens souhaité par le gouvernement »,  d’autres magistrats, telles la première présidente de la cour d’appel de Versailles, s’oppose à cette anonymisation et défendent la loi. « Nous sommes responsables de nos décisions […] qui sont rendues publiquement », insiste-t-elle. La haute magistrate considère qu’il faudra accompagner cette diffusion des décisions de justice « car il y aura forcément des comparaisons, des magistrats qui seront pointés ». Pour elle, il est important de revenir « à la collégialité dans un certain nombre de domaines sensibles ».

Une avancée majeure, mais insuffisante

Cette loi est une avancée majeure dans le contrôle de la justice par le peuple français au nom duquel elle est rendue. Elle obligera à une cohérence accrue et favorisera une meilleure justice. Mais sera-t-elle suffisante ?
Déjà, selon la Chancellerie, ce mouvement prendra même « plusieurs années » !
Soit un exemple récent et sensible- les auto-entrepreneurs de certaines plates-formes de service tels Uber ou certains de ses concurrents sont-ils ou pas des salarié déguisés ? Le 20 décembre, les prud'hommes de Paris ont condamné un concurrent d'Uber à verser à un ancien chauffeur près de 30.000 euros. Pour la première fois en France, un autoentrepreneur du numérique - en l'occurrence un chauffeur de VTC - a obtenu gain de cause face à une plateforme. Les prud'hommes de Paris ont requalifié ses contrats commerciaux en contrat de travail et condamné ce concurrent d'Uber à verser à son ancien chauffeur près de 30.000 euros en rappel de salaires, paiements d'heures sup, et indemnisation pour travail dissimulé.
Sauf que, comme le souligne le service juridique de la CFDT, «en matière de requalification, tout est question de conditions de faits», donc d'examen au cas par cas de la situation. «Preuve que la jurisprudence n'est pas établie, dans une affaire avec la même société et le même contrat, la cour d'appel de Paris a rejeté la requalification en contrat de travail» !
Je maintiens que dans des exemples de ce type, afin d’assurer la même justice pour tous, ce dont il est responsable, le pouvoir politique a le droit et même le devoir d’intervenir et de donner des instructions aux juges, ne serait-ce que de façon temporaire en attendant si besoin est le vote de nouvelles lois ou décrets, de façon à harmoniser leurs décisions. Dans des cas d’un tel enjeu pour la société, u la loterie judiciaire est  insupportable !
Donc oui, une avancée majeure, mais suffira-t-elle à contrecarrer les méfaits du corporatisme judiciaire ? L’opinion publique sera informée des dysfonctionnements, ainsi que le gouvernement, et ceux-ci apparaitront de plus en plus intolérables. Mais qu’est-ce qui changera si le pouvoir de sanctionner des magistrats fautifs reste aux mains de leurs seuls collègues ? La manifestation publique des monstruosités de l’affaire d’Outreau n‘a pas entrainé de sanctions à sa mesure, ni même de garanties solides, à part la collégialité, peu appliquée, contre sa reproduction.

Pour que la justice retrouve la légitimité nécessaire qu’elle doit avoir, il faudra peut-être 1) que Le Conseil Supérieur de la Magistrature ne soient pas composés de magistrat mais de représentants désignés par l’Assemblée Nationale, le Sénat et la Présidence de la République pour un mandat donné, de façon à ce que les juges ne soient pas jugés par leurs pairs exclusivement 2) A défaut, ou peut-être en sus, que comme aux USA ou en Suisse, les juges soient élus.

samedi 11 février 2017

Du corporatisme judiciaire

Le corporatisme judiciaire de l’affaire Calas à l’affaire Sauvage

Lors d’un précédent blog, à propos d’une  critique d’une décision sur les cordons ombilicaux, j’ai évoqué la qualité douteuse de la justice rendue en France,  le droit que les juges s’accordent de ne pas respecter les lois, en l’occurrence de bioéthique, leur refus d’être mis en cause et de rendre des comptes au peuple français, au nom duquel pourtant la justice est censément rendue. Et ceci, au nom bien sûr de l’indépendance de la justice, en réalité d’un corporatisme qui devient insupportable et tyrannique. Je me sens d’ailleurs de moins en moins seul dans cette exaspération, puisqu‘au moins les deux derniers présidents de la République ont tenu des propos très critiques sur la magistrature.
Rappelons tout de même que c’est contre le corporatisme judicaire, et non contre le pouvoir royal, que Voltaire a protesté lors de l’affaire Calas et lors de celle du Chevalier de la Barre, (contre les bœufs tigres) … Et que nous sommes dans un pays ou récemment encore un certain nombre de magistrats n’ont pas admis que le juge et le procureur qui ont si gravement failli dans l’affaire d’Outreau aient dû s’expliquer devant la Représentation Nationale –et qu’en définitive le tragique juge Burgaud ait subi la plus légère sanction de la part de ses collègues.
De même lors de la récente affaire Jacqueline Sauvage, où l’opinion publique n’a pas admis le  très sévère jugement rendu en son nom (dix ans de prison) contre cette femme martyre…et les magistrats n’ont pas admis la grâce partielle accordé par le Président François Hollande en janvier 2016, et par deux fois, refusé la mise en liberté conditionnelle qu’elle aurait dû normalement entraîner, maintenant Mme Sauvage en prison pendant encore un an, jusqu’à ce que M. Hollande décide d’une grâce totale et impose sa mise en liberté, après la Noêl 2016 ! Et encore, certains de leurs représentants ont-ils protesté et multiplié les tribunes dénonçant cette décision qui constituerait selon eux une atteinte à l’indépendance de la justice.
Eh bien je dis que les magistrats qui, au nom de peuple français, ont, contre la volonté claire du Président de la République, représentant le plus légitime du peuple français, maintenu Jacqueline Sauvage en prison, je fis, au nom du soixante millionième que je représente que je suis pas satisfait de leur justice, que je les méprise,  et que je souhaite qu’ils soient sanctionnés.

Démocratie et justice : le corporatisme judiciaire comme tyrannie

Allons plus loin ; il est parfaitement licite qu’en démocratie, le pouvoir politique donne, de façon totalement publique, des instructions aux juges, de manière générale ou même dans des affaires particulières, quitte à ce qu’il en soit comptable devant les électeurs.
Ainsi, dans l’affaire d’Outreau, lorsque même les policiers chargés de l’enquête ont compris qu’ils se sont fait tromper par des accusations de plus en plus invraisemblables des coupables, qu’ils l’ont dit et que le juge a maintenu des innocents en prison dans des circonstances terribles et avec les conséquences les plus graves pour leurs enfants, je dis qu’il aurait été  normal que le pouvoir politique puisse donner théoriquement et pratiquement l’ordre de libérer les détenus faussement impliqués- rappelons que la détention préventive doit être l’exception au cas où un prévenu risque réellement de fuir la justice ou de la fausser.
Dans l’affaire Jacqueline Sauvage, il serait parfaitement licite que le pouvoir politique ait, en théorie et en pratique, le droit d’imposer la mise en liberté immédiate de Mme Sauvage, en expliquant qu’il ne s’agît pas d’une amnistie donnée à ce qui reste un meurtre, même accompagné des circonstances atténuantes les plus fortes, mais d’affirmer que le jugement rendu et la sévérité de la sanction  sont en contradiction avec la volonté politique et du peuple français et combien justifiée de lutter contre les violences conjugales, et que celles-ci doivent prévaloir.
Autre exemple : un certain nombre d’associations, tels le Collectif contre l’Islamophobie en France mènent de façon évidente des campagnes qu’il faut bien appeler d’intimidation judiciaire ; ils se moquent des intentions réelles ou de la véracité des propos tenus ou des écrits, et même de leur chances de gagner leurs procès. Non, leur but est véritablement d’harcèlement et d’intimidation de façon à réduire au silence tous ceux qui défendent des idées contraires aux leurs ; car même s’ils n’obtiennent pas condamnation, ils obligent leurs adversaires à consacrer du temps et des moyens non négligeables à défendre leur liberté d’expression. cf récemment «  le procès honteux fait à George Bensoussan, Marianne 20 janvier 2017)).
Eh bien, les magistrats français qui jugent ces plaintes recevables, les procureurs qui font mécaniquement leur métier de procureurs, en digne successeurs du grand  Mornet, et requièrent des peines se font tout simplement les complice de ces tentatives d’intimidation. Et intimidation est encore un euphémisme, car dans un certain nombre de cas (les éditeurs de Salman Rushdie, Charlie Hebdo), l’intimidation judiciaire s’est terminée par l’assassinat ! Là aussi, les magistrats qui se font complices de ces intimidations de varient pouvoir être sanctionnés.
Et je dis que dans ces cas là, le pouvoir politique devrait légitimement pouvoir, en théorie comme en pratique, imposer le rejet de ses plaintes au nom de la défense de la liberté d’expression.

Restaurer la légitimité de la justice

Qu’on me comprenne bien. Il ne m’a pas échappé  que tous les régimes totalitaires ont supprimé l’indépendance de la justice- ce qui fait d’ailleurs que l’argument peut se retourner : l’indépendance de la justice est donc une bien faible  garantie contre le totalitarisme puisqu’on la supprime si facilement ! Si l’on veut avoir une idée des vraies valeurs humaines et morales qui protègent contre le totalitarisme, relire Soljenitsyne et Zinoviev !
Mais dans une démocratie, l’indépendance de la justice ne saurait servie de protection à tous les abus judiciaires, ni au corporatisme le plus absolu et au refus de rendre des comptes sur l’administration de la justice et la légitimité final et celle du peuple et de ses représentants démocratiquement élus.
Le mécontentement,  l’écœurement voire le mépris des Français envers la justice devient problématique et est entretenu par un corporatisme judiciaire sans limites.

Deux pistes pour que la justice retrouve la légitimité nécessaire qu’elle doit avoir. 1) que Le Conseil Supérieur de la Magistrature ne soient pas composés de magistrat mais de représentants désignés par l’Assemblée Nationale, le Sénat et la Présidence de la République pour un mandat donné, de façon à ce que les juges ne soient pas jugés par leurs pairs exclusivement 2) A défaut, ou peut-être en sus, que comme aux USA ou en Suisse, les juges soient élus.(cf  le blog d Aurane Reihanian sur Huffington Post)